Mon premier voyage au Pays de Musashi : Hiroshima
- Lucie
- 4 févr. 2015
- 5 min de lecture

Au moyen d'un Japan Rail Pass d'une durée de 7 jours, j'ai pu découvrir en train une partie du Japon, d'Est en Ouest. Ce pass est économique, facile d'utilisation mais aussi très pratique. Autre atout, on peut le commander par internet avant son départ.
En gros, ce précieux sésame m'a permis, pour le prix d'un aller-retour Tokyo-Kyoto, de visiter le Japon librement pendant une semaine sur l'ensemble du réseau JR.

C'est ainsi qu'en quelques jours j'ai pu me rendre à Osaka, Kyoto, Tsu, Ise, Hiroshima et Miyajima. Certaines destinations étaient prévues bien avant mon arrivée au Pays du Soleil Levant.
Le fait de me rendre à Hiroshima lors de mon premier voyage nippon était pour moi une évidence, voire une nécessité. J'avais dès le départ inclus cette ville dans mon parcours. Désir d'Histoire, devoir de mémoire ou pélerinage pour l'humanité, peu importe, je me devais d'y aller. Le nom d'Hiroshima a toujours raisonné en moi comme une étape indispensable dans ma vie.
HIROSHIMA
Préfecture d'Hiroshima, Région de Chûgoku
Hiroshima est une ville dynamique et florissante composée d'une population cosmopolite. C'est la capitale de la préfecture de Hiroshima et la principale ville de la région de Chôgoku.
Pourtant, son nom n'évoque qu'une seule chose : le premier bombardement atomique, le 6 août 1945.

La fondation d'Hiroshima remonte à 1589, lorsque Terumoto Môri y édifia son château.
La ville se développe et devient un important centre urbain sous l'ère Meiji et par la suite l'une des principales bases logistiques de l'armée impériale du Japon. Hiroshima joue un rôle stratégique important pendant la Seconde Guerre mondiale. Elle est au centre de la défense terrestre de tout le sud du Japon et est aussi un complexe industriel de première importance.
Entièrement reconstruite après le cataclysme subi pendant la guerre, Hiroshima fut proclamée Cité de la Paix par le parlement japonais en 1949, devenant ainsi à la fois le symbole de l'horreur et le témoin porteur d'un message de paix.
La belle Hiroshima m'a surprise pour deux choses. D'une part, cette ville a énormément de charme, contrairement à ce que l'on pourrait imaginer. Une atmosphère spéciale s'y dégage, peut-être une atmosphère de sagesse et de sérénité.
D'autre part, plus je m'approchais du Dôme, plus je manquais d'air et une pression envahissait tout mon corps, et cela jusqu'à ce que mon souffle se coupe devant ce macabre vestige, le Dôme, témoin de l'horreur. Mon corps et mon coeur étaient lourds comme jamais auparavant. Cette lourdeur, je l'ai portée tout au long de ma visite du Mémorial de la Paix. Me rendre à Verdun avait déclenché en moi une sensation similaire.
Dôme de la Bombe A


Symbole de la destruction de Hiroshima, le Dôme de la bombe A est inscrit au Patrimoine Mondiale de l'UNESCO depuis 1996. Il est également appelé Genbaku Dômu, en référence au terme japonais genbaku, abréviation du terme genshibakudan, signifiant « bombe atomique ».
Conçu en 1915, ce bâtiment servait de palais de l'Industrie jusqu'à ce que la bombe atomique explose juste au-dessus. Tous les gens qui se trouvaient à l'intérieur furent tués. Il est l'un des rares édifices à être restés debout à l'épicentre de l'explosion. Conservée dans le même état qu’immédiatement après le bombardement, il est le symbole de la force la plus destructrice que l'homme ait jamais créée et il incarne en même temps l'espoir de la paix dans le monde et de l’élimination définitive des toutes les armes nucléaires.
Les bords de la rivière Ôta

Vue du Dôme depuis l'autre côté de la rivière Ôta

Une fois que l'on a traversé la rivière Ôta, on se trouve dans le Parc du Mémorial de la Paix. Celui-ci, ouvert en 1954, est parsemé de monuments commémoratifs.
La Cloche de la Paix

La Cloche de la Paix, inaugurée en 1964, présente un planisphère sur sa surface. Le son de la cloche, fait partie depuis 1996 des « 100 sons du Japon ».
Le Monument des enfants pour la Paix

Ce monument fut inauguré en 1958. Il est Inspiré par la jeune Sadako Sasaki. En 1955, Sadako alors âgée de 11 ans, développa une leucémie due à son exposition aux radiations. Elle décida de réaliser 1 000 grues de papier plié, symbole de longévité et de bonheur. Sadako était convaincue qu'en atteignant son objectif, elle pourrait guérir. Elle mourut avant d'y parvenir, mais ses camarades de classe réalisèrent les pliages manquants.
Ces grues sont devenues un symbole de paix, et de nombreux enfants visitant le mémorial laisse un origami au pied de la statue.

Flamme de la Paix et cénothape


Comme on peut le voir sur la photographie du dessus, le cénotaphe contenant les noms de toutes les victimes connues de la bombe est situé dans l'alignement de la Flamme de la Paix et du Dôme.
La Flamme de la Paix ne sera éteinte que le jour où la dernière arme nucléaire sera détruite.
Musée du Mémorial de la Paix


Le musée du Mémorial de la Paix présente les évènements qui ont conduit à la guerre et au bombardement. L'horreur du 6 août 1945 est montrée à travers des documents d'une grande variété (maquettes, lettres, photographies, reproductions taille réelle des scènes d'apocalypse...).
La première partie du musée est centrée sur l'explication du contexte de la Seconde Guerre Mondiale, de l'élaboration de la bombe atomique et du pourquoi Hiroshima comme cible. Ce qui m'a frappée, c'est l'incroyable objectivité avec laquelle tout est raconté. Personne n'est accusé et les crimes commis par les Japonais ne sont pas occultés.

2h45, le 6 août 1945, le bombardier B-29 Enola Gay, piloté par Paul Tibbets, décolle de la base de Tinian, avec à son bord Little Boy, une bombe atomique à l'uranium 235 d'une puissance de 15 kilotonnes. 8h15, la bombe est larguée. 8h16, la bombe explose à 587 mètres du sol, au-dessus de l’hôpital Shima, situé au cœur de l'agglomération et près du Dôme. 8h16, 75 000 personnes sont tuées sur le coup. On ne connaît et ne connaîtra sans doute jamais le nombre exact de victimes. Entre les blessés ne survivant pas à leurs blessures et les maladies dues aux radiations, on estime aux alentours de 250 000 victimes.


La seconde partie du musée présente les dégâts humains et matériels de la catastrophe dans une ambiance beaucoup plus pesante. C'est le coeur et la gorge serrés que l'on poursuit la visite. Des décors reproduisent l'horreur au moyen de mannequins de cire. Des objets retrouvés dans les ruines ainsi que des photographies de la ville se font les témoins d'un monde post-apocalyptique. J'aurais pour tout le restant de ma vie, ancrées dans ma tête, ces images de restes d'uniformes d'écoliers, de chaussures ou d'autres objets du quotidien brûlés.

Même s'il en reste aujourd'hui très peu, dans les salles du musée oeuvrent les hibakusha, "les victimes de la bombe". Ces personnages âgées, reconnaissables à leurs badges de bénévoles sont là pour raconter leur histoire, transmettre leurs valeurs et idées. Je ne leur ai pas directement adressé la parole, moi la touriste occidentale gênée alors que je n'y étais pour rien. Mais les voir se tenir là devant moi a marqué ma vie. Moi qui étudie beaucoup l'histoire dans les livres, ce jour-là, elle se tenait en face de moi, en chair et en os.
Visiter ce musée constitue en soi une épreuve. Apocalypse, horreur, colère, dégoût, consternation, gêne, doute, remise en question, espoir. Voilà les mots que j'emploierai pour décrire cette rencontre avec l'Histoire.
Depuis la catastrophe qui l'a frappée, Hiroshima a su s'imposer dans le monde comme "ville de la Paix", militant ardemment contre les armes nucléaires. Même si cette journée fut émotionnellement très difficile, je ne regrette en aucun cas de mettre pris cette "claque" de l'Histoire du monde. Je ne retournerai sans doute pas à Hiroshima pendant mon long séjour nippon, mais j'ambitionne cette fois-ci de me rendre à Nagasaki, cible du deuxième bombardement atomique américain pendant la Seconde Guerre Mondiale.
Hiroshima fut pour moi non seulement une leçon d'histoire, mais aussi une leçon de vie.
8h15

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